Une affaire d’un père dont la petite fille a sexuellement été agressée en métropole et qui s’est fait personnellement justice, défraye la chronique. Les réquisitions prononcées à son encontre prônent de lourdes sanctions. Mais ce genre de cas n’est pas étranger à Mayotte…
Mardi en début de soirée à Mtsangamouji, plusieurs individus ont séquestré un homme qui a été ligoté avant d’être abondamment frappé et de le faire marcher dans les rues de la localité attaché et en laisse pour retrouver un autre comparse qui serait responsable de vols.
Le but de la manœuvre était ainsi de retrouver les objets volés et qui ont effectivement été récupérés.
En attendant, le ligoté n’a pas reconnu avoir participer au vol et les victimes de vols risquent de lourdes peines.
L’auto-justice, ou vigilantisme, est le fait de faire exercer la loi ou un code moral particulier de manière généralement collective, violente, secrète et en dehors de toute procédure judiciaire légale.
Car dans le domaine pénal, l’enquête est à la charge d’un juge d’instruction et de la police judiciaire. Des preuves peuvent certes être amenées par la victime et son entourage, mais l’enquête exige en général de mener des actions interdites à un citoyen, car portant atteinte à la vie privée et aux diverses libertés individuelles : retenir une personne contre son gré pour l’interroger, mener une fouille…
Dans la même veine de justice personnelle mais en métropole, le tribunal correctionnel de Roanne jugeait mardi une affaire datant de l’automne 2022 qui avait divisé l’opinion. Un homme et trois de ses voisins avaient appréhendé celui qu’ils pensaient être l’agresseur sexuel de sa fille, la veille dans sa maison de Roanne. Il avait été livré aux policiers après avoir été violemment rossé. Il s’agissait d’un mineur âgé de 16 ans…
Fustigeant un « passage à tabac », le procureur s’est émis d’une dérive inacceptable. « L’état de droit, c’est ce qui nous protège. Il appartient à une seule autorité, l’autorité judiciaire, de dire si vous êtes coupables, de vous condamner. Quand on s’arroge le droit de prendre des photos, d’interpeller les gens dans la rue, et de commettre des violences, c’est une dérive grave que l’on ne peut pas accepter”…
Le parquet a ainsi réclamé 18 mois de prison dont 6 à 9 mois avec sursis contre le père, deux ans dont un an avec sursis et un an dont six mois avec sursis pour les deux autres accusés. Ils seront fixés sur leur sort le 7 mars.
Mayotte ne fait pas exception, la justice personnelle n’a pas sa place au sein de la société, surtout si les auteurs des faits sont connus et identifiés. Il suffit alors de déposer plainte auprès des forces de l’ordre et d’assurer les signalements nécessaires. Cela évite de devenir accusé après avoir été victime.
Samuel Boscher