S’il est un sujet clivant sur le territoire mahorais, c’est bien celui de l’immigration. Lundi dans le prolongement d’une réunion de travail, les élus ont décidé de donner de la voix et de montrer leurs profonds désaccords.
Si les lois de la République doivent être respectées ; de tout temps à Mayotte, la population locale critique un certain nombre des dispositions applicables comme par exemple le fait que le visa délivré à Mayotte ne permette pas aux étrangers de quitter l’île au lagon pour partir en métropole ou encore la possibilité d’obtenir un titre de séjour alors même que le bénéficiaire est en situation irrégulière. De l’avis de tous, l’immigration clandestine bien différente de l’immigration légale, nourrit tous les maux de la société mahoraise, la population peine aujourd’hui à faire la différence entre clandestins et immigrés. De plus en plus souvent, le fait de bénéficier d’un titre de séjour après avoir mis au monde un enfant à Mayotte, alors même que la mère est en situation irrégulière, crée la confusion dans les esprits, le sujet est particulièrement sensible.
Une délégation de l’Office Française de l’Immigration et de l’Intégration (OFII) était à Mayotte ces derniers jours pour à la fois inaugurer les nouveaux bâtiments de l’institution mais aussi pour travailler avec les élus sur la politique d’intégration française applicable à Mayotte. A l’occasion d’une réunion de travail, le directeur de l’OFII ainsi que la directrice de l’asile et du directeur de l’intégration au ministère de l’Intérieur se sont réunis autour du préfet Suquet en présence des élus mahorais. Mansour Kamardine rapporte que : « Les membres de la délégation ont exposé une orientation tendue vers la fluidification de la gestion des titres de séjours et de la fluidification de l’examen des demandes d’asiles, c’est- à-dire une politique axée sur la consolidation de la présence, en masse, d’étrangers à Mayotte. Face à cette orientation opposée aux intérêts de Mayotte et rejetée par les Mahorais, les élus, unanimes, se sont fait porte-parole de la population et ont défendu la nécessité d’une ferme maîtrise des frontières dans un département où une large majorité des habitants n’est pas de nationalité française. »
Les élus de Mayotte ont donc de manière assez unanime rappelé quelles étaient leurs attentes en matière de politique migratoire qui peuvent se résumer autour de 4 axes : la suppression du titre de séjour spécifique à Mayotte face au refus que ce titre permette d’accéder au territoire métropolitain ; l’instruction des demandes d’asile dans les consulats français des pays de transit des candidats à l’asile ; l’instruction des demandes des titres de séjour pour les primo-demandeurs dans les consulats français des pays d’origine ; le renforcement de la maîtrise des frontières par le positionnement de la police aux frontières (PAF) au nord de Mayotte, le développement d’une véritable base de la Marine nationale et l’affectation d’un patrouilleur outre-mer de nouvelle génération à Mayotte, la création d’une unité de surveillance par drone.
Selon plusieurs élus participant à cette réunion, les priorités mahoraises n’ont pas été entendues par les responsables de l’OFII et du ministère de l’Intérieur, les élus mahorais ont donc décidé de manifester leur désapprobation sur les orientations politiques présentées en refusant de participer à l’inauguration du bâtiment à Mayotte. Mansour Kamardine rappelle, «le temps est venu pour l’Etat que le déploiement des politiques publiques se fasse en co-construction avec les élus désignés par la population.»
Espérons pour le bien de Mayotte que la volonté de fermeté des élus mahorais puisse s’inscrire dans le temps pour réellement faire changer les politiques publiques.
Anne Constance Onghéna
Pour France Mayotte matin