novembre 15, 2024

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La maire de Chirongui écrit au président du SIEAM

14h00:

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Lettre de Roukia Lahadji à Moussa Mouhamadi Bavi

Monsieur le Président,

Tout d’abord, veuillez être assuré de ma volonté ferme et déterminée à garantir à la population mahoraise des services publics de qualité dans des conditions tarifaires maîtrisées. Soyez convaincu que jamais je n’accepterai ni une augmentation du prix de l’eau, ni de hausse des impôts liés à une défaillance des pouvoirs publics ou de leurs délégataires. Le débat que je souhaite ouvrir est ailleurs ; il ne consiste nullement à prendre parti entre notre syndicat et son délégataire mais au contraire de juger en connaissance de cause de ce qui est le mieux pour notre département aujourd’hui et pour nos enfants demain.

A la fin de l’année 2018, des rumeurs avaient circulé sur une rupture anticipée du contrat d’affermage entre le SIEAM et la SMAE. Lors d’une réunion de !’Association des Maires de Mayotte, vous aviez démenti cette rumeur le 7 décembre dernier sans pour autant nous dissimuler les tensions existantes avec le délégataire du contrat d’affermage. A cette occasion, nous vous avions demandé l’organisation d’une réunion en présence de la SMAE afin qu’ils puissent exposer leurs arguments. Force est de constater qu’aucune suite n’a été donnée à cette requête et nous apprenions le 25 janvier dernier, sans que l’ordre du jour de la convocation ne l’ait précisé, que vous aviez fait voter la renégociation du contrat de délégation du service de l’eau potable en Comité syndical.

Monsieur le Président, je tiens à vous exposer ici pourquoi j’estime dangereuse, dans ces conditions, la rupture anticipée de ce contrat pour Mayotte et les Mahorais et pourquoi j’ai déposé un référé au Tribunal administratif pour faire annuler la délibération du 25 janvier relative à cette renégociation de contrat.

En effet, hier, une réunion d’urgence a été convoquée en présence des Maires, des services de l’Etat, de la SMAE et de vous-même pour évoquer les enjeux et les risques d’une éventuelle rupture. La SMAE a eu notamment l’opportunité de s’exprimer en indiquant que les impayés et les indemnités à prévoir en cas de rupture s’élèveraient à 30 millions d’euros. L’entreprise nous a rassurés sur leur engagement à assurer le service de l’eau pendant la passation du nouveau marché (inclus dans les clauses du marché actuel) mais en nous alertant tout de même sur la révision du prix du marché. Mon interrogation à ce stade est pragmatique : qui va prendre en charge la facture ?

Nous connaissons les difficultés du syndicat, le budget primitif 2019 a été voté en déséquilibre avec un déficit de 13,5 millions sur le budget du service de l’eau potable (+20% de hausse du déficit sur la section d’investissement) et un déficit de 5,3 millions sur la section de fonctionnement du service de l’assainissement collectif. Ce prévisionnel n’intégrant pas les coûts liés à une rupture anticipée du contrat, comment seront-ils absorbés ? Encore une fois, les Maires se sont prononcés à l’unanimité hier devant le délégataire : nous ne tolérerons aucune conséquence sur le prix de l’eau, ni sur les cotisations des communes car cela reviendra à augmenter les impôts.

A l’occasion de la réunion d’hier, le mauvais état du réseau a été souligné : Ouroveni, Mamoudzou hôpital, les réseaux du sud, sont autant de points noirs qui faute d’intervention proportionnée conduisent à une dégradation du service. Nous le savons, la qualité de l’eau est corrélée à celle des réseaux. La SMAE nous a affirmé hier avoir adressé chaque année au syndicat, un rapport d’activité intégrant des préconisations  en terme d’entretien et d’investissement pour faire face à ces dysfonctionnements, ces rapports auraient été validés (y compris sur le plan comptable) par le syndicat mais aucune suite n’aurait été donnée.

L’Etat nous a également appris que si aujourd’hui les différents forages et mesures prises nous permettaient d’être à l’abri de rupture d’approvisionnement, d’ici quatre ans, si rien n’était fait, les tours d’eau risquaient de se reproduire. Comment mieux anticiper et se prémunir de ce risque ? Entre les travaux et le temps de remplissage, c’est entre trois et quatre années qui sont nécessaires pour la création d’une retenue collinaire. Nous  ne pourrons dire aux Mahorais que nous ne savions pas ! Nous connaissons la situation et nous devons, main dans la main, travailler collectivement à identifier des solutions pérennes.

Des solutions pérennes, le SIEAM y travaille déjà. Le Contrat de Progrès signé en juillet 2018 est un outil très ambitieux qui permettra grâce aux 82,47 millions des fonds européens et de l’Etat complétés par 35 millions de prêts AFD et CDC et de la FCTVA à hauteur de 23 millions de concrétiser le plan pluriannuel d’investissement du syndicat. L’appui du Ministère de l’Outre-mer via l’AFD permet d’ores et déjà la mobilisation d’une assistance en matière d’ingénierie en faveur du syndicat à hauteur de 2,5 millions. Grâce à ces moyens dédiés, notre syndicat a les moyens de réussir et de devenir un acteur incontournable du développement de Mayotte et de l’amélioration de la qualité de vie de ses habitants.

Cher Président, votre combat en faveur de l’amélioration de la gestion de l’eau est plus que louable mais ne nous trompons pas d’objectif. Le temps nous est aujourd’hui compté pour faire face à des défis colossaux sur un des premiers besoins vitaux de l’homme, celui de l’eau : comment garantir à la population mahoraise une eau non seulement de qualité mais également, sans rupture d’approvisionnement  dans un contexte d’instabilité climatique ? Renforçons collectivement nos moyens de contrôle sur le délégataire, exigeons de lui le meilleur pour Mayotte, préparons ensemble le renouvellement du contrat d’affermage pour 2021 et battons-nous pour que les Mahorais puissent jouir de ce droit inaliénable d’accès à l’eau.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président du SIEAM, mes salutations distinguées.

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