Pour M.Guevenoux « Au regard de toutes les crises, Mayotte est un territoire prioritaire pour le gouvernement »
La ministre déléguée chargée des Outre-mer, Marie Guévenoux, expose dans un entretien avec la rédaction, la stratégie politique qui sous-tend l’opération « Mayotte Place Nette », visant à rétablir l’ordre et la sécurité à Mayotte. Avec 1700 forces de l’ordre mobilisées et des mesures renforcées, cette initiative vise à lutter contre la délinquance, l’immigration irrégulière et l’habitat insalubre. Le gouvernement veut reprendre le terrain concédé aux délinquants
France Mayotte Matin : Lors de votre dernier séjour, vous aviez dit que Wuambushu aurait un autre nom, quel est-il ?
Marie Guevenoux : Mayotte fait face à plusieurs crises majeures, une crise démographique et migratoire qui submerge l’île, et une crise de la sécurité qui déstabilise profondément le département. Face à cette situation, notre objectif est simple : ramener le calme à Mayotte et installer durablement la paix sociale. C’est ce que nous demandent nos compatriotes mahorais.
L’an dernier, Gérald DARMANIN a lancé l’opération Wuambushu qui a permis de lutter très efficacement contre la violence, l’immigration irrégulière et l’habitat illégal.
Pour aller loin, nous lançons ce matin une nouvelle opération, Mayotte PLACE NETTE. A l’heure où je vous parle, les forces de l’ordre sont déjà sur le terrain, en train de frapper aux portes des délinquants que nous avons ciblés et qui gâchent la vie des mahorais depuis bien trop longtemps.
FMM : En quoi va consister cette opération ? elle commence quand ? quels seront les moyens mobilisés ?
MG : L’opération se poursuivra jusqu’à la fin du mois de juin.
Elle permettra de mener à bien trois objectifs principaux : lutter contre l’insécurité et les bandes, casser les filières d’immigration clandestine et détruire l’habitat indigne.
Au total, 1700 gendarmes, policiers et militaires sont mobilisés. C’est plus de forces de l’ordre que dans les villes de Nice, Montpellier et Rennes réunies.
Nous mobilisons aussi plusieurs bateaux, à la fois proche des côtes et en haute mer, dans le canal du Mozambique, pour couper la route des grands lacs. Dans les airs, un avion survolera les abords de l’île pour détecter et permettre l’interception rapide des kwassas kwassas.
FMM : Le 11 février, Gérald Darmanin a parlé d’une autre dynamique pour le maintien de l’ordre ? Quelle est-elle et quand commence-t-elle ?
MG : Depuis 2017, l’Etat s’engage pour la sécurité des mahoraises et des mahorais comme dans nul autre département. Les effectifs de policiers et gendarmes ont doublé, pour passer à 1150 fonctionnaires. Un détachement permanent du RAID a également été installé à Mamoudzou et 4 unités de forces mobiles ont été pérennisées sur l’ile.
Depuis le 11 février, cette dynamique s’est encore intensifiée. Avec Gérald Darmanin nous avons pris des mesures complémentaires pour renforcer la sécurité des mahorais : démantèlement du camp de Cavani, interdiction des ventes de machettes, neutralisation des chiens d’attaque, mise en place d’une conférence de sécurité autour du préfet chaque mois, …
Avec Mayotte PLACE NETTE, nous allons porter un grand coup à la délinquance à Mayotte. Outre la mobilisation d’un grand nombre de forces de l’ordre, nous allons pouvoir compter sur le renfort depuis Paris d’une centaine de fonctionnaires spécialisés, notamment de la PAF et des officiers de police judiciaire, qui nous permettrons de frapper avec précisons là où ça fait mal.
FMM : Comment vous êtes-vous assurés que le syndicat de la magistrature ne fera pas de politique et ne mettra pas tout en œuvre pour empêcher le process d’aller à son terme ? (Un peu comme lors de wuambushu 1 et le décasage de Koungou)
MG : J’ai confiance dans la justice de mon pays qui est indépendante. Je n’ai pas à commenter son action.
FMM : Combien d’opérations de décasage pendant Mayotte place nette qui vont concerner combien de cases ? ou les ayants droits seront-ils hébergés puisque les migrants africains du stade de Cavani occupent tous les logements prévus à cet effet ?
MG : Tous les acteurs locaux s’accordent à dire que Wuambushu a été bénéfique pour le territoire. 60 chefs de bande ont été interpellés et l’opération a permis de détruire 700 Bangas et de renvoyer 25 000 étrangers en situation irrégulière dans leur pays d’origine. C’est 85% de plus qu’en 2020. Un an plus tard, nous avons pour objectif de détruire deux fois plus de bangas. Pour reloger les familles, une enveloppe exceptionnelle de 5 millions d’euros a été débloquée.
FMM : Comment être certains que l’Union des Comores n’empêche pas comme pour wuambushu 1 une partie des objectifs d’être atteints ?
MG : Les Comores sont un partenaire majeur de la France dans la région avec qui nous entretenons un dialogue régulier, franc et exigeant. Nous avons des divergences, mais aussi des points de convergence. Nous poursuivrons donc notre dialogue, extrêmement régulièrement, c’est notre intérêt commun.
FMM : Pour faire face à l’immigration, des navires de la marine Nationale vont-ils se positionner ? Quand ?
MG : L’immigration illégale est un fléau pour Mayotte. Les mahorais n’en peuvent plus. C’est pour cette raison qu’avec le Président de la République et Gérald DARMANIN, nous avons pris l’engagement d’en finir avec le droit du sol à Mayotte. Avec cette mesure, nous cassons définitivement l’attractivité du territoire. C’est un signal extrêmement fort envoyé à toute la zone.
Parallèlement, nous agissons méthodiquement pour barrer la route des embarcations qui la traversée. Tout au long de l’opération, 2 vedettes de la gendarmerie se relayeront en permanence le long de nos côtes et un bâtiment de la marine nationale sera positionné en haute mer dans le canal du Mozambique, pour bloquer la route migratoire des grands Lacs et casser ces flux.
Propos recueillis par Anne Constance Onghéna