13 h23
Daniel Zaidani écrit au Président du Conseil Départemental et aux élus de la majorité
« Avec l’adoption du budget primitif 2019, lors de la séance plénière du mardi 09 avril 2019, vous venez de définir pour la 5ème année consécutive les priorités du Conseil Départemental en terme de sociale, de développement économique, d’investissement et d’organisation globale de notre administration.
A ce titre, j’ai voté contre ce budget qui me semble totalement en rupture avec les attentes de la population.
En effet, Monsieur le Président, il serait tant de comprendre que les Mahoraises et les Mahorais vont mal. Et ce tourment populaire, il vous a encore été exprimé publiquement, le dimanche 31 mars 2019, lors de votre congrès pour le 10ème anniversaire de la consultation de la population sur la Départementalisation de l’île de Mayotte. Mais encore, il faudrait l’avoir compris….
Malheureusement, le déni de la réalité pour ne pas dire le mensonge semble être devenu la marque caractéristique de cette majorité!
Alors que vous êtes à la tête de la Collectivité depuis maintenant 4 ans (soit l’équivalent de la durée des présidences de vos prédécesseurs depuis la décentralisation de 2004), vous agissez comme si toutes vos difficultés tiraient leurs origines dans la mandature précédente. A mon sens, il serait tant d’assumer vos erreurs et vos échecs!
D’ailleurs, l’exemple du fameux déficit du Conseil Départemental est édifiant….
En effet, il convient de vous rappeler, ici, que le compte administratif du CD pour l’année 2014 a été arrêté par vos soins le 29 avril 2015 affichant un excédent cumulé de +15,3 millions d’euros (voir le rapport n° 2015-002074) traduisant ainsi un héritage positif légué par la mandature précédente. De la même manière, le rapport n°2015-002075 sur le compte de gestion 2014 tenu par les services de l’Etat qui a également été adopté lors de cette même séance, corrobore ce résultat.
Par contre, le fameux déficit le l’année 2015 résulte d’une multitudede mauvaises décisions politiques prise dans les six premiers mois de votre mandat.
Ainsi, l’adoption par le groupe majoritaire du rapport N°2015-002328 du 06 octobre 2015 Relatif à la décision Modificative 2015 du Président Soibahadine, a tragiquement crée le déficit de 45 millions d’euros du CD.
Pour être parfaitement claire, ce rapport a acté trois positionnements politiques qui ont été dommageable pour la suite de votre mandature,pour le Conseil Départemental, pour Mayotte et pour notre population de manière générale :
1/ Vous avez acté dans ce rapport : le non respect de la compensation de l’équilibre des recettes du département lors de la réforme fiscale de 2014, soit une perte de recette de 20 millions d’euros par an que vous n’avez pas défendu dès votre arrivée en 2015 (soit une perte financière pour le Département de Mayotte et donc pour la population de Mayotte de 100 millions d’euros à ce jour).
2/ A la demande de la Préfecture, vous avez acté dans ce rapport : la Restitution en 2015 à l’Etat de 32 millions d’euros de recette (Impôt sur les Revenus et Impôt sur les Sociétés) que nous avions perçus en 2013 par arrêté préfectoral signé par le Préfet lui-même. Vous avez donc choisi de donner à l’Etat cette manne financière qui appartenait au Conseil Départemental plutôt que de défendre nos intérêts devantle tribunal administratif pour arbitrer ce contentieux (comme vous le faite si bien dès qu’il s’agit « port » …).
3/ A la demande de la Paierie départemental, vous avez acté dans ce rapport : la Renonciation par le Département de recouvrir 15 millions d’euros des recettes non-perçues essentiellement auprès de différentes collectivités locales sur un total de 45 millions d’euros. Ainsi, ces 15 millions d’euros des recettes non-perçues ont étébasculées en créances douteuses.
Ces trois décisions politiques totalisaient déjà un manque financier de 66 millions d’euros, en 2015, pour le Conseil Départemental. Alors il apparait évident que le fameux déficit de 45 millions d’euros de l’année 2015 tire exclusivement son origine dans vos choix politiques. C’est peut être dur à l’admettre pour vous ou à le reconnaitre publiquement, mais c’est la triste réalité. D’autant plus qu’avant de commettre ces erreurs, j’avais pris le temps d’appeler directement le Président, les membres du Cabinet, le Vice-président chargé des finances et le Président du groupe de la Majorité pour modifier ce rapport. J’avais insisté sur les maux profonds qui allaient s’abattre sur la population. Aussi, les années 2016, 2017 et 2018 (sursaut en fin d’année) ont été marqués par :
– Mise en place d’une politique drastique visant à résorber le déficit qui se traduira par la renonciation de la participation de la Collectivité dans l’accompagnement auprès des personnes fragiles (aides, BRSA, Emploi d’Avenir, etc.), des associations, des communes et des entreprises ;
– Augmentation systématique de toutes taxes par le Conseil Départemental (Taxes foncières, taxes d’habitation, Octroi de Mer, taxes aéroportuaires, …);
– Mise en berne du PPI (Plan Pluriannuel d’Investissement) : Défection des établissements de crédit conduisant à la remise en question des projets structurant pour Mayotte : nouvelle Cité administrative, route de contournement de Mamoudzou ou encore le Pont reliant la Petite à la Grande-Terre, équipements sportifs territoriaux, … ;
– Difficulté majeure d’honorer la participation du Département aux projets de Co-financement tels que le CPER (378 millions d’euros) ou les fonds Européens (environ 320 millions d’euros) soit des taux de consommation extrêmement faible surles 700 millions d’euros d’investissement prévus sur la période 2014-2020 pour Mayotte;
En résumé, je vous prédisais que Mayotte allait traverser une crise sociale et économique majeure affectant les entreprises locales et donc les Mahoraises et les Mahorais. Mes prédictions furent confirmer assez rapidement avec notamment la multiplication des grèves y compris celle du Medef (…du jamais vu !) et par l’INSEE Mayotte avec la publication en février 2019 des statistiques sur le chômage à Mayotte. Il indiquait qu’au 2e trimestre 2018, 25 600 Mahorais se trouvaient au chômage, soit 5 000 de plus qu’un an auparavant. Le taux de chômage s’établissait à35 % (+ 5 points en un an !!!). Il précisait également que la population en âge de travailler était toujours plus nombreuse à se présenter sur le marché du travail et qu’en parallèle le nombre d’emplois diminuait (comprendre : recul des commandes publiques). En lien notamment avec la baisse des contrats aidés et la diminution des salariés des collectivités territoriales.
Cher collègue, le budget primitif 2019 que vous nous avez présenté, ce mardi 09 avril 2019, n’offre guère de signe positif pour la population en particulier avec unexcédent présenté de manière ostentatoire alors qu’il symbolise toutes les restrictions infligées aux Mahorais.
Comment, après 4 ans de mandature de disette, accepté que le premier gros investissement de cette majorité, à savoir 16 millions d’euros, soit l’acquisition d’un « château » (qui n’est pas inscrit dans notre PPI) dans le quartier chic du 16ème arrondissementde Paris (voir le rapport n°2019-3596 de la Commission permanente du 04 février 2019) .
Commentexpliquer à la population que depuis plus de deux ans, 82 millions d’euros sont gelés dans le budget annexe Santé et Protection de l’enfance alors que les besoins sont immenses tant dans le domaine social que dans le domaine économique ?
Comment comprendre que vous maintenez dans le budget primitif 2019 vos différents taux de taxation qui asphyxie tant les contribuables alorsque le résultat de l’année 2019 devrait êtrede +38 millions d’euros ?
J’ai voté, avec lucidité, contre l’adoption de ce budget primitif 2019 parce que la défendre des intérêts des Mahoraises et des Mahorais n’était pas au rendez-vous dans ce rapport.
Dans l’espoir qu’un rapport « Relatif à la décision Modificative 2019 » soit présenté aux élus rectifiant ces injustices, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président par Intérim, l’expression de mes salutations distinguées. »