La crise de l’eau à Mayotte oblige les autorités à prendre des décisions fortes. Une réunion est prévue aujourd’hui, et de plus longues coupures d’eau sont possibles.
Alors que la saison des pluies s’annonçait prématurée, force est de constater qu’il n’a pas plu de la semaine. Une situation qui peut sembler inquiétante, sur laquelle le comité de suivi de la ressource en eau se penchera aujourd’hui. Il sera ainsi décidé, en fonction des informations transmises par chacun, du scénario et de la conduite collective à tenir pour répondre au mieux aux enjeux de la pénurie hydrique.
S’il est un sujet sur lequel il est difficile d’avoir des certitudes, c’est bien celui de la crise de l’eau ; suspendus au bon vouloir des cieux, populations et instances décidantes semblent évoluer ensemble dans la même indécision… Tout le mois de novembre durant, la pluie était au rendez-vous à Mayotte, dans des proportions d’ailleurs légèrement plus élevées qu’à l’accoutumée pour cette période de l’année. Une factualité qui révèle
un caractère rassurant, et ce quelques deux mois après le début des coupures d’eaux restrictives : la fin du tunnel était-elle alors enfin arrivée ?
Quid de la saison des pluies ?
Néanmoins, l’absence totale de pluie de cette dernière semaine fait l’effet d’une douche froide sur une population qui s’impatiente : qu’en est-il de la saison des pluies ? Originellement, les prévisions des autorités concernées estimaient que les retenues collinaires seraient vidangées d’ici la fin du mois de novembre. Les précipitations du mois dernier ont changé la donne : il est désormais estimé que dans l’hypothèse ou Mayotte ne connaît aucun épisode pluvieux d’ici au 31 décembre, c’est alors seulement au début du mois de janvier que les retenues collinaires – actuellement à 24 % de leur capacité – seront vides.
S’il faudra attendre cet après-midi pour que les prévisions officielles de Météo-France soient communiquées au public, c’est également – entre autres – grâce à ces données que les prochains axes de gestion de la crise hydrique seront décidés. En effet, le comité de ressources en eau (constitué des services de la préfecture, de l’ARS, du SMEAM, de la SMAE, de l’OFB etc.) se réunira aujourd’hui. En fonction des données communiquées par Météo-France, mais aussi en se basant sur les bilans chiffrés des différents partenaires, il s’agira alors de décider entre plusieurs scénarios distincts, comme nous l’explique la préfecture. La première option serait de passer à des coupures d’eau plus longues, de 30 heures (recoupant deux nuits) à 48 heures.
Des coupures d’eau de 48 heures ?
La seconde serait d’attendre, si les prévisions météorologiques annoncent de fortes précipitations à venir. Enfin la dernière, la plus improbable, serait le statu quo. Le mois de novembre a été passé dans l’attente de la décision d’une date de mise en œuvre de mesures restrictives plus fortes, date logiquement retardée par l’arrivée des premières précipitations. Toujours dans l’expectative, il s’agira ainsi de s’adapter aux prévisions et aux chiffres. A noter également que la période des vacances scolaires arrive, période à laquelle la consommation est généralement revue à la baisse, entre l’absence d’une partie de la population et le fait que le nettoyage quotidien des écoles ne soit plus d’actualité.
La décision prise aujourd’hui pourrait être cruciale : si les retenues collinaires se retrouvent totalement vidées, Mayotte perdra d’un coup 40 % de sa production d’eau. Se poseront alors de nombreux problèmes d’approvisionnement : sans les retenues, les principales sources d’eau et forages sont situés dans le nord de l’île : quels moyens faudrait-il alors pour dérouter cette eau jusque dans le Sud, où les ressources sont bien plus minces ? « L’objectif, c’est de ne pas arriver au seuil de vidange », nous confie la préfecture. Un seuil qui correspond à 50 mm3 pour chacune des retenues, niveau à partir duquel l’on sera confronté à un risque de turbidité de l’eau, c’est à dire une eau souillée de particules et de matières en suspension.
Le navire de dessalement, toujours d’actualité?
La solution évoquée par le préfet au début de la crise concernant l’acheminement d’un navire de dessalement jusqu’au 101ème département n’est plus d’actualité : les délais d’acheminement sont conséquents, et les pluies du mois de novembre ont poussé à retarder cette décision. Rien d’encore certain à ce stade donc, avec des autorités qui marchent sur des œufs pour le moment, décidées à ne pas prendre des mesures plus pénalisantes encore pour la population tant qu’elles ne seront pas certaines qu’il n’y en a pas d’autres à mettre en oeuvre avant.
A l’instar de toute cette crise de l’eau, toutes les éventualités restent de mise pour le moment ; mais ce n’est qu’une question d’heures avant que quelques nouvelles annonces ne viennent éclairer le ciel nuageux – sans
être pluvieux pour autant – des incertitudes des mahorais…
Un article de Mathieu Janvier, à retrouver dans le France Mayotte Matin du 8 décembre.