novembre 22, 2024

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Situation inacceptable et dangereuse aux Urgences : les urgentistes dénoncent

09h27 :

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Lettre ouverte des médecins urgentistes du service des Urgences/SAMU/SMUR/EVASAN du Centre Hospitalier de Mayotte à l’attention des médias :

L’objet de ce courrier est de faire part de notre inquiétude collective concernant l’accueil des patients aux urgences du Centre hospitalier de Mayotte.

L’augmentation du nombre de patients qui consultent aux urgences nous place aujourd’hui en numéro 2 dans l’Océan indien, juste derrière le Centre Hospitalier Universitaire de la Réunion avec près de 50 000 passages annuels. Mais à Mayotte, à la différence avec l’île de la Réunion, nous travaillons sans médecine libérale, sans maison médicale de garde, sans effecteur mobile comme SOS médecins, sans spécialistes quasi-absents de l’île, sans spécialités interventionnelles d’urgence (coronarographie pour les syndrome coronarien, radiologie interventionnelle, chirurgie thoracique, vasculaire et neurochirurgicale), les possibilités de transport sanitaire vers La Réunion sont limitées alors qu’elles nous permettraient de sécuriser nos prises en charge.

Les situations que nous prenons en charge aux urgences sont graves. Nous assumons aujourd’hui, en plus des urgences adultes, les urgences pédiatriques, les urgences gynéco-obstétricales, les urgences médico- légales (coups et blessures, agressions sexuelles et viols), les urgences psychiatriques et le caisson hyperbare (accident de plongée), ce dernier étant assuré sur le temps libre et la base du bénévolat.

Travailler à Mayotte signifie pour nous tous travailler en mode dégradé, sous contraintes et parfois, sans filet de sécurité. Les EVASAN sont possibles dans des délais plus ou moins acceptables puisque soumis aux contraintes de notre planning, et de celles du transporteur aérien partenaire.

Nous sommes ici car nous croyons à la santé pour tous, indépendamment des situations administratives et sociales, que nous aimons notre métier, et avons tous à cœur un engagement médical et citoyen.
Cela fait des mois qu’une partie des postes aux urgences ne sont pas pourvus. Nous travaillons presque tous les jours avec des postes manquants. Cela impacte notre temps de travail mais surtout la qualité de notre travail. Nous faisons des efforts depuis plusieurs années, mais nos limites ont été atteintes. La qualité de notre accueil – les délais d’attente et la courtoisie- s’en ressent et nous déplorons le sentiment de maltraitance rapportépar certains patients et leurs familles. Encore plus grave, le temps dédié au diagnostic, au traitement et à l’orientation se voit réduit et parasité par les multiples tâches que nous avons à effectuer, majorant le risque d’erreur et d’accident de prise en charge.
De plus, nous venons d’apprendre l’absence totale d’internes affectés aux urgences de Mamoudzou entre mai et septembre 2017. Habituellement 6 à 8 internes sont affectés aux urgences. Les internes sont des médecins en formation qui sont essentiels à notre fonctionnement. Ils participent à la continuité des soins, au service de gardes et d’astreintes, et permettent ainsi de sécuriser l’accueil des patients aux urgences en particulier lorsqu’un des deux médecins de garde sort en intervention SMUR. En l’absence d’internes, le médecin de garde restant aux urgences devra assurer la responsabilité de l’accueil des nouveaux patients, des patients graves, de tout évènement grave et imprévu, de la surveillance et du suivi de tous les patients en cours d’examen, ainsi que du service d’hospitalisation des urgences. Cette situation est inacceptable et dangereuse. Nous redoutons du fait de notre épuisement, du sous-effectif et de la pénibilité du travail qu’à très court terme il y ait une mise en danger des patients.
Notre situation est connue de l’administration et a fait l’objet de nombreuses alertes. Nous espérons une contribution à trouver des solutions suite à nos rencontres avec la direction hospitalière ce jour.

Cependant nous connaissons les limites et les difficultés de recrutement, c’est pour cela que nous interrogeons le Groupement Hospitalier de Territoire (GHT) entre Mayotte et la Réunion, censé favoriser un égal accès à des soins sécurisés et de qualité pour nos concitoyens. Dans ce contexte de crise aigüe, une solidarité territoriale serait précieuse.

L’épuisement des médecins urgentistes de Mayotte est réel. Un nombre non négligeable de praticiens du service se sentent contraints d’envisager un départ à contrecœur, après pour certains, des années d’investissement qui va bien au-delà de leur temps de travail officiel.

Nous refusons de faire courir des risques aux patients du fait du sous-effectif, et de notre épuisement. C’est pourquoi nous venons de rédiger le planning pour le mois d’avril, qui montre qu’en respectant notre temps de travail légal, plus aucun médecin ne sera présent dans le service des urgences de Mamoudzou à compter du 18 avril 2017 et jusqu’à la fin du mois.

Nous avons sollicité l’administration hospitalière afin qu’une solution pour remplacer les internes absents soit rapidement mise en place concernant le semestre de mai à octobre 2017. Nous demandons également l’augmentation des effectifs paramédicaux –infirmier(e)s et aide-soignant(e)s– aux urgences et le respect du temps de travail des urgentistes. Nous souhaitons travailler dans des conditions qui nous permettent de respecter le droit du travail afin de pouvoir délivrer des soins de qualité telle que nous devrions l’attendre dans un département français.
En l’absence de prise en compte de nos demandes, nous envisageons malheureusement une vague de départ sans aucune perspective d’arrivée de nouveaux médecins, pouvant mettre en danger à très court terme la prise en charge des urgences à Mayotte.

Signée par le Collectif des urgentistes du service des Urgences/SAMU/SMUR/EVASAN du Centre Hospitalier de Mayotte

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