novembre 04, 2024

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5 recommandations des sénateurs pour un meilleur accès aux soins

Soucieuse que soit assuré sur l’ensemble du territoire un égal accès aux soins, la commission des affaires sociales a mené une mission sur l’accès aux soins à Mayotte.

Les sénatrices et sénateurs se sont ainsi rendus à La Réunion, puis à Mayotte du 28 février au 5 mars 2022. À l’issue de ce déplacement, la commission propose différentes recommandations visant à soutenir une amélioration durable du système de santé.

 

En attendant, leur constat est affligeant pour Mayotte.

Ce constat fait par l’Insee en 2021 dans son enquête Santé DOM en 2019 est confirmé par les principaux indicateurs de santé, qui demeurent à Mayotte dans une situation particulièrement mauvaise au regard de la moyenne nationale.

Le taux de mortalité est ainsi nettement supérieur à l’Hexagone dans certaines tranches d’âges et la mortalité infantile atteint 9,6 ‰ contre 3,8 ‰ dans l’Hexagone.

Surtout, territoire confronté à une extrême pauvreté, Mayotte connaît toujours des maladies infectieuses très peu présentes au niveau national, comme l’hépatite A ou a vu des re?surgences de choléra ou d’épidémies de fièvres typhoïdes. Le département, comme La Réunion, est exposé aux épidémies de dengue. Enfin, la malnutrition touche encore 10 % des enfants de 4 à 10 ans.

De l’autre côté, Mayotte montre des caractéristiques de santé de pays beaucoup plus développés, avec par exemple une forte prévalence de surpoids et d’obésité. 26 % de la population était obèse en 2019.

 

Mayotte est encore aujourd’hui concernée par de graves problèmes d’accès à l’eau. L’Insee estimait à 29 % les ménages qui n’en disposaient pas à l’intérieur de leur logement en 2017.

Face à cette situation et en l’absence de mise à disposition par les communes de points d’accès gratuit à l’eau, l’agence régionale a agi avec la mise en place de rampes d’eau mais aussi par la structuration d’un réseau de bornes fontaines, accessibles par cartes prépayées.

*?Si Mayotte compte aujourd’hui une centaine de bornes, l’ARS estime les besoins à 240.

 

Mais encore, le renoncement aux soins est particulièrement élevé sur l’île où 45 % des habitants de plus de 15 ans déclarent avoir dû renoncer à des soins en 2019.

34 % de la population renonce aux soins pour un motif financier, alors que la protection universelle maladie (PUMa) n’y est pas applicable, ni la complémentaire CMU-C – devenue complémentaire santé solidaire dans le droit commun.

L’extension à Mayotte de la CMU-C et de dispositifs d’exonération de ticket modérateur, promise en 2018 dans le plan pour l’avenir de Mayotte, n’a pas été concrétisée.

 

Mais encore, le CHM comptait en 2021 400 lits en médecine-chirurgie-obstétrique (MCO) et réalisait 40 070 séjours.

Si une offre privée est en cours de développement, les seuls établissements de santé privés à Mayotte se concentrent sur l’activité de dialyse.

En outre, la médecine de ville est aujourd’hui encore balbutiante, seulement près de 390 professionnels de santé libéraux exerçaient à Mayotte en 2021.

Le territoire souffre d’un manque d’attractivité dû notamment à la situation sociale tendue et à l’insécurité préoccupante.

À part pour l’activité de maternité, le nombre de lits disponibles est bien en deçà des ratios moyens constatés au niveau hexagonal. Le différentiel de capacité rapporté à la population recensée est considérable en MCO : le nombre de lits représentant à peine 40 % de la moyenne hexagonal, avec 1,56 lit pour 1 000 habitants.

 

Le territoire ne disposant pas d’une offre suffisante dans l’ensemble des spécialités et ayant des besoins largement supérieurs aux capacités, les transferts et évacuations sanitaires sont particulièrement déterminants pour permettre aux patients qui en ont besoin d’accéder dans de bonnes conditions aux soins qu’ils requièrent.

Le nombre d’évacuations sanitaires est particulièrement dynamique : de 500 en 2010, les transferts ont atteint 1 452 en 2021.

Pour l’essentiel, les transferts et évacuations répondent à des soins programmés.

Afin de mieux prendre en charge les patients venus de Mayotte et organiser au mieux la complémentarité de l’offre de soins que La Réunion doit apporter, le centre hospitalier universitaire de La Réunion a établi avec le CHM une convention étendue en 2019 à l’échelle du groupement hospitalier de territoire (GHT) de La Réunion.

 

L’appui du CHU à destination de Mayotte est également concrétisé par l’envoi de missions médicales, sur un champ très large de spécialités – 24 ont été réalisées en 2021 – ou encore par le développement d’emplois partagés d’assistants médicaux ou de praticiens.

 

 

Ainsi, le Centre hospitalier de Mayotte recensait 10 708 naissances en 2021, soit 25 par jour. Cette activité est toujours en très forte progression, avec 17,1 % d’augmentation entre 2020 et 2021, et plus de 11 500 naissances attendues en 2022.

La maternité capte une part écrasante de l’activité du centre hospitalier : elle représente 58,9 % des 24 166 séjours en hospitalisation conventionnelle en 2021.

Le CHM apparaît aujourd’hui comme un établissement débordé et qui n’est pas en capacité de faire face aux besoins ni d’accueillir les patients dans des conditions satisfaisantes.

Les soins se concentrent ainsi de fait sur des activités non programmées et les soins urgents. Pas de prévention possible, mais aussi peu ou pas d’activité de chirurgie programmée.

«Le niveau d’activité du CHM reste sous tensions sur ses capacités d’hospitalisation avec certains secteurs plus impactés et qui connaissent des taux d’occupation très élevés bien au-delà de leur capacitaire ».

Cette description de la situation est faite par l’établissement lui-même dans les perspectives 2022 de son rapport financier pour 2021. Alors que le CHM est le principal mais souvent le seul offreur de soins, il assure les naissances, les actes de chirurgie mais doit aussi pallier les lacunes d’accès aux soins primaires ou encore les faiblesses reconnues de la protection maternelle et infantile.

 

 

Recommandations des sénateurs

 

-Recommandation n° 1 : Soutenir la structuration de l’offre de soins à Mayotte et la montée en capacité du centre hospitalier de Mayotte et des structures de santé par un plan à horizon 2035 permettant une visibilité pour les acteurs locaux et des déclinaisons pluriannuelles dans le cadre du plan régional de santé.

Assurer un suivi pluriannuel des engagements et évaluer la capacité de ces actions à répondre aux besoins de santé et à renforcer l’attractivité du territoire pour les professionnels de santé. (Gouvernement / Agence régionale de santé)

 

-Recommandation n° 2 : Réaliser, suivant les constats de l’agence régionale de santé, les adaptations législatives et réglementaires pour mieux faire correspondre le droit applicable aux réalités du territoire.

Faire entrer dans le droit commun les dispositifs qui le peuvent – comme le cadre applicable aux URPS – et prévoir les dérogations aujourd’hui rendues nécessaires par les particularités de la situation mahoraise – par exemple concernant l’autorisation des maternités périphériques –.

Répondre plus efficacement aux demandes de dérogations formulées par le directeur général de l’agence régionale de santé. (Gouvernement / Parlement / Agence régionale de santé)

 

-Recommandation n° 3 : Assurer rapidement une capacité de recours programmés aux soins primaires et garantir dans les prochaines années une capacité de soins programmés en chirurgie.

Renforcer les offres de consultations de médecine et soutenir des actions d’ « aller vers » à destination des populations précaires. (Centre hospitalier de Mayotte)

 

-Recommandation n° 4 : Conduire la réalisation des engagements relatifs aux droits à l’assurance maladie. Envisager l’extension à Mayotte de la protection universelle maladie (PUMa) et réaliser rapidement l’arrivée de la CMU-C et des exonérations de ticket modérateur selon le revenu. Engager une réflexion sur le droit applicable concernant la prise en charge de frais de santé des personnes en situation irrégulière et la possibilité de l’aide médicale d’État lors d’une résidence constatée de plus de trois mois. (Gouvernement / Assurance maladie)

 

-Recommandation n° 5 : Renforcer, avec les collectivités locales, le réseau des bornes fontaines soutenu par l’agence régionale de santé et assurer des points d’accès gratuit à l’eau potable sur le territoire. (Agence régionale de santé / Département et communes de Mayotte)

 

 

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